samedi 20 août 2011

Les corps analystes

La sortie de mon second ouvrage Les corps analystes. Mouvement et travail corporel en psychanalyse est prévue pour février 2012, chez DANGLES. Plus qu'une suite des Transitions corporelles dans l'analyse, paru chez Fabert en 2008, c'est du véritable déploiement du praticable qu'il s'agit, et ce aussi bien dans le colloque singulier que dans le dispositif de groupe. Les Ateliers du Geste y sont présentés comme une thérapie contemporaine par le groupe. Les ateliers sont largement inspirés par les transitions corporelles, elle-mêmes en résonnance particulière avec les arts contemporains. Pour exemple dans le livre, la manière dont l'oeuvre de la photoplasticienne belgo-allemande Ulrike Bolenz a inspiré des transitions frontalières pour travailler avec des patients borderlines. Dans l'Atelier du Geste, les corps en participation renforce le champ énergétique et cela rend possibles autant de rencontres insolites avec l'étranger en soi.
L'une des idées maîtresses du livre tourne autour de la transe, jusqu'à penser toute analyse à transitions corporelles comme une forme de trans(e)analyse. De tout temps, les humains ont recours aux transes. Actuellement, beaucoup de transes modernes sont sauvages et dangereuses, échappant à tout contrôle. Comme le souligne fort justement Catherine Clément, l'auteur du très beau livre L'appel de la transe, une transe ne s'ouvre sur la métamorphose de l'existence et n'est thérapeutique que si elle est soigneusement surveillée, régulée, ritualisée. Chevaucher les frontières et forcer les passages ne se fait qu'avec discipline. L'auteur évoque d'ailleurs une discipline de la frayeur qui rend possible le frayage de nouvelles voies de subjectivation. Dans Les corps analystes, nous proposons des éclipses éphémères et transitionnelles comme autant de transgressions créatives qui ouvrent plus largement la conscience corporelle. Qu'elles prennent appui sur le contact, le mouvement, la posture, la respiration ou les quatre à la fois, elles im-pliquent les corps analystes et leur permettent de congresser, régresser, transgresser et progresser ensemble en toute sécurité.
Comme cela fut dit au Congrès szondien de Nice, est-ce parce que l'homme n'a pas de centre qu'il est sans cesse poussé du côté du contact, du sexuel ou du paroxysmal, cherchant à s'éclipser puis à s'envelopper de tous côtés ? Marc Ledoux évoquait le concept de biose chez Von Weiszacker, cette force de l'étranger en soi, et proposait de retourner la formule freudienne pour qu'elle devienne Là où j'étais, ça doit advenir. C'est bien ce que la trans(e)analyse propose: faire confiance à l'improvisation des corps-sujets.


Dans l'effervescence de l'instant transi et tremblé, quelque chose se réanime et se dompte, se troue et s'initie, de nouveaux sentiers sont ouverts à l'existence du sujet. L'épreuve corporelle est celle de la secousse ou de l'étourdissement puis de l'apaisement: corps et monde s'y rencontrent, mêlent leurs textures.